mercredi 6 mai 2015

Déminage toute. La proposition de loi des radicaux de gauche qui imposait une

Air Jordan Déminage toute. La proposition de loi des radicaux de gauche qui imposait une «neutralité en matière religieuse» pour les employées des crèches et des centres de loisirs privés bénéficiant d'une aide financière publique, arrive dans l'hémicycle le 13 mai, dépouillée de ses attributs les plus corrosifs. Au grand soulagement des socialistes qui se sont démenés pour persuader leurs alliés de lisser le texte, mais aussi de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), de l'Observatoire de la laïcité et d'institutions religieuses. Selon nos informations, le rapporteur (PRG) Alain Tourret doit proposer, lors du débat à l'Assemblée nationale, de retirer l'obligation de ne porter aucun signe religieux ostentatoire dans les centres de loisirs et centres sociaux. Ne resterait que le devoir «de neutralité» en crèche, article qui doit être aussi largement réécrit. «La première mouture était une vraie boîte à baffes», soupire un député PS.

Défrichage. Le texte polémique des très laïcs radicaux de gauche n'en est déjà pas à son premier effeuillage. Baptisée «PPL Baby-loup» - allusion à la longue bataille juridique opposant la crèche à une ex-salariée licenciée pour avoir refusé d'ôter son voile -, la proposition de loi avait été votée au Sénat en janvier 2012. Avant de prendre la poussière dans les cartons de l'Assemblée. Les députés PRG s'en sont souvenu début 2015, profitant de leur «niche» qui permet à chaque groupe de mettre au débat le texte de son choix. Lors de la discussion en commission des Lois, début mars, premier obstacle : il est notamment prévu d'interdire tout signe religieux visible aux assistantes maternelles, même travaillant chez elles, à défaut d'une autorisation mentionnée spécialement dans le contrat de travail. Une contrainte, concernant en particulier les nounous musulmanes voilées, qui flirte avec l'inconstitutionnalité, jugent les députés qui le suppriment. Mais ce défrichage de la loi laisse entrevoir d'autres points de friction… voire un malaise général chez les socialistes, qui plus est à quelques semaines d'élections départementales mal engagées. Le président de l'Assemblée, Claude Bartolone, et d'autres députés alertent sur le risque de stigmatiser la communauté musulmane. Le PRG est prié de remiser son texte en mai.

Mais la majorité doit encore se dépêtrer du reste de ce texte mal ficelé. L'Eglise a pesé de tout son poids. Un paradoxe, le texte visant initialement le voile musulman. Les institutions catholiques ont craint d'être elles-mêmes soumises à ces nouvelles contraintes. C'était le cas des camps scouts pour lesquels certains parents reçoivent des bons des caisses d'allocations familiales. En mars, le président de la conférence des évêques de France, Georges Pontier, s'est fendu d'un communiqué dénonçant «un dévoiement de la lettre comme de l'esprit qui régit la loi de 1905». Pour les responsables religieux, le combat se situait aussi sur le terrain des principes.

Calage. L'Observatoire de la laïcité, comme la CNCDH, jugent également inutile de légiférer sur le fait religieux dans des structures privées accueillant des mineurs. Leurs présidents respectifs Jean-Louis Bianco et Christine Lazerges ont évoqué le sujet avec Claude Bartolone lundi soir. A l'arrivée, les radicaux consentent, de leur côté, à retirer la mention sur les centres de loisirs. Les PRG Roger-Gérard Schwartzenberg et Alain Tourret, ainsi que Philippe Doucet, en charge de la laïcité pour le groupe PS, et deux conseillers de Bernard Cazeneuve se sont vus mardi midi pour un ultime calage. Ils se sont aussi accordés sur la nécessité de réécrire l'article portant sur les crèches et les haltes-garderies pour les enfants jusqu'à l'âge de six ans. Le texte débattu mercredi prochain devrait s'en tenir à la transposition de la jurisprudence rendue en juin 2014 dans l'affaire Baby-Loup. La Cour de cassation avait confirmé le licenciement de la salariée voilée. «Cet arrêt sera force de loi», confirme Doucet. Des tractations sont encore en cours mais les opposants ont déjà obtenu gain de cause.

Le PS s'en sort en évitant d'humilier franchement un de ses derniers alliés, le PRG, qui sauve la face en maintenant son texte. «Ils sont dans la majorité, on les traite gentiment, veut croire un socialiste. Ils voulaient une victoire symbolique, en se réappropriant le drapeau de la laïcité», ADN du PRG.

Nike Free Run Divisé. Pourtant l'épisode a aussi montré les flottements socialistes sur la question controversée de la laïcité. «Cela nous oblige à nous interroger sur le fait qu'on n'est pas au clair entre nous, avoue un député en pointe sur le sujet. On avait une doctrine générale et Marine Le Pen a préempté le thème pour en faire un outil antimusulmans, on ne peut pas lui laisser cette valeur.» Alain Tourret confirme: «Il est certain que le PS est divisé. Je croyais que la frange de ceux qui sont très laïcs, comme nous, était plus forte. Mais le PS a peur de ses banlieues.»


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